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Tony Parker : sur scène aussi, c’est de la balle !

par THIERRY SUIRE - PHOTOS : COLLECTION MUSÉE NATIONAL DU SPORT, NICE


Le basketteur de génie est entré au cours de l’été dans le Hall of fame, le Panthéon des basketteurs de NBA. Quelques semaines plus tôt, il était devenu la 3e légende du Musée National du Sport. L’occasion d’une Masterclass publique à l’opéra de Nice. On y était !



Sur les parquets comme sur la scène de l’opéra de Nice, Tony Parker est un magicien. Aussi agile sous le cercle qu’avec la langue de Molière. Roi de la NBA et prince du stand-up. Lancers-francs, franc-parler, il enchaîne les points dans les cœurs niçois.

Il a suffi de quelques secondes pour que la star du basket bluffe son auditoire, lors de sa Masterclass publique organisée par le Musée National du Sport. Un petit jeu interactif avec le public, le rappel de sa rivalité historique avec l’équipe d’Espagne. Et c’est une promenade de santé assurée pour l’ex-sportif, désormais président de l’ASVEL et homme d’affaires. Meneur un jour, meneur toujours.

Entre les pognes du renommé commentateur de basket David Cozette, le maître à jouer a dribblé toutes les questions, shooté punchline sur punchline, avant de siffler la fin de la partie au terme de 1h30 d’échanges et de flash-back vidéo. Retour sur sa vie, son œuvre. Tout en maîtrise mais sans faux-semblants.


ORGANISME GÉNÉTIQUEMENT PROGRAMMÉ

Dès son premier cri, à Bruges, Tony possède un capital génétique prometteur. Papa basketteur américain professionnel, maman mannequin néerlandaise. Deux continents qui font sa force. Son histoire. Avec l’european mum toujours là pour le ramener les pieds sur terre. Et, la US touch du dad : « confiance en soi et culture de la gagne ». Loin de la rengaine de Coubertin : Le plus important, c’est de participer. « Cette phrase, quand j’allais à l’école, j’avais du mal avec ça. On joue, c’est pour gagner », dunke le champion.

Entre ces deux cultures, Tony pioche son équilibre. Un équilibre utile pour affronter les hauts et les bas d’une carrière. Une carrière à laquelle il a toujours cru. Biberonné aux vidéos de Jordan, l’idole. Focus sur sa destinée. Champion ou rien. Rien d’autre en tout cas. « Quand tu dis ton rêve à quelqu’un et qu’il ne se fout pas de toi, c’est que ton rêve n’est pas assez grand », glisse Tony à tous les minots présents dans l’enceinte niçoise, telle une offrande sous le panier. On le disait trop petit, trop maigre. Pas de quoi le démonter. A 14 ans, il lance à un prof qui le tance : « J’ai pas besoin des cours, je vais aller en NBA ». Et, c’est bien dès ce jeune âge qu’il intègre l’INSEP. Le début de l’aventure, du haut niveau, des potes d’enfance. Futurs potes de l’équipe de France. « C’est là qu’on a commencé à se dire : on peut y arriver. La NBA est devenue un vrai objectif, une obsession. C’est là que j’ai rencontré Boris Diaw, Ronny Turiaf ». Avec eux, il décroche le titre de champion d’Europe juniors. Avec eux, il évolue en 3e division (National 1) « face à des vieux briscards. C’est parfait pour progresser. J’étais attendu mais j’adorais ça ». A 15 ans, il est meilleur marqueur de la compétition. Il ne reste que deux ans à l’Institut du sport. Signe son premier contrat pro à 17 ans au PSG Racing. Puis, tout s’accélère. Un nouveau monde l’attend.


« Victor Wenbanyama a le potentiel pour faire une carrière à la Tim Duncan et marquer l’histoire de la NBA. C’est tout le bien que je lui souhaite. Et puis, je suis content qu’il arrive aux Spurs, c’est génial pour nous ».

SAN ANTONIO, UN ROMAN à SUCCÈS !

A 19 ans, Tony réalise le rêve américain. Les Spurs de San Antonio le draftent en 28e position. Dans la foulée, le 6 novembre 2001, il devient le plus jeune meneur titulaire d’un 5 majeur de NBA. Il restera 17 saisons dans la franchise du sud des Etats-Unis.

A 21 ans, il est le premier Français à remporter le titre en NBA en 2003. Trois autres titres suivront (2005, 2007 et 2014). Il est même élu MVP des finales NBA lors du sacre de 2007.

Une incroyable réussite mais qui ne s’apparente pas à un chemin pavé de roses. Un homme marque ce parcours : c’est le coach emblématique des Spurs, Gregg Popovitch. C’est lui qui parie sur le jeune frenchy : « Il m’appelle et me dit qu’il pense que je vais être le meneur du futur. Moi, je me dis une chose : je vais faire regretter toutes les équipes qui ne m’ont pas pris ! » Tout heureux d’être dans une grosse cylindrée avec notamment le géant Tim Duncan et le pivot David Robinson. « C’est génial pour moi », glisse Tony. Sur la pointe des pieds, il s’assoit sur le banc des remplaçants et apprend. Mais, après seulement cinq matchs, le coach l’appelle. « On est dans l’avion, je me dis : Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? Je commence à paniquer. Il me dit : Tony, j’ai plus envie d’attendre, j’en ai assez vu, demain t’es titulaire. » Sauf que le minot pique le poste du grand pote du meilleur joueur de l’équipe. Il s’inquiète : « Je réponds : mais Tim Duncan, il a dit quoi ? » Tim est OK. A peine les pieds sur terre, il appelle son père : « Papa, demain je suis titulaire. C’est un truc de malade ! » Il tient le poste pendant 17 ans. Pendant trois ans, il n’est pas pour autant épargné par le coach. « Pop, il venait de l’armée, il était très dur. Il m’insultait. Parfois, je rentrais de l’entraînement, j’avais les larmes aux yeux et je me demandais si j’allais réussir. J’avais l’impression que jamais je ne pourrais le satisfaire. Et lui, il faisait exprès, il testait mes limites. Voir si j’allais répondre présent mentalement. Je ne changerais en rien cela parce que c’est dans la difficulté que tu vois si tu as les facultés nécessaires pour revenir encore plus fort. » Quant à la star Tim Duncan : « La première année, il ne m’a pas parlé. En play-off, on joue Seattle et dans cette équipe-là, il y avait Gary Payton, qui était considéré comme un des deux meilleurs meneurs de la NBA. Je joue un de mes meilleurs baskets de ma jeune carrière ». Les Spurs l’emportent. « Et là, première phrase de Duncan : On a peut-être une chance de gagner un titre avec toi. »

Et des bagues, ils en décrocheront quatre, ensemble, dans une fidélité partagée à San Antonio. Celle que Tony met au-dessus de toutes les autres, c’est la victoire de 2014, arrachée avec le pote Diaw dans la team. « Il y a l’attente pendant 7 ans. En 2014, ce sont les journalistes qui le disent : on joue l’un des plus beaux baskets de l’histoire de la NBA. Je suis très fier d’avoir été un des moteurs de cette équipe ».



PRÉSIDENT PARKER

Si on lui demande pourquoi, après une telle carrière, il n’est pas sur un bateau en train de se la couler douce, il envoie dans un large sourire : « Le tour du monde avec son bateau, non, c’est pour Boris ça ! » Puis plus sérieusement : « C’est la volonté de redonner, maintenant. Je suis animé par la transmission et j’ai envie de partager avec la nouvelle génération. Très tôt, mes parents m’ont dit : une carrière de basket, ça ne va pas durer toute la vie, donc prépare-toi. » Il demande conseil à Michael Jordan, maître absolu en après-carrière. « Il m’a dit : fais ton réseau maintenant, passe du temps avec les chefs d’entreprise. A la retraite, les gens ne te rappellent pas. Très tôt, pendant ma carrière, j’ai investi dans le club de l’ASVEL-Villeurbanne. Puis, j’ai racheté le club masculin en 2014, le club féminin en 2017 et l’académie en 2019. Je reste concentré sur mes trois pôles : le sport évidemment avec les clubs de basket, la station de ski et les chevaux ; l’éducation avec l’académie de Lyon, l’académie à Paris ; et l’art de vivre avec le champagne, le vin et Smart good things (société de vente de produits de bien-être). »

Une vie bien remplie qui comble son après-carrière : « Aujourd’hui, quand je vais au boulot, j’ai pas l’impression de travailler, je suis avec des gens que j’aime. » Après avoir marqué l’histoire de son sport, il veut « faire des choses bien pour la société, avoir un impact sur la société. »


L’ÉQUIPE DE FRANCE, SON ÉTOILE

Il n’oublie pas cette flamme pour l’équipe de France, née à l’adolescence avec ses potes de l’INSEP. Elle est là, toujours en tête. « Quand on a décroché le titre de champion de France Juniors, c’est comme si je me faisais une promesse à moi-même : ramener à la France la première médaille d’or de son histoire. Et pendant longtemps, je me suis dit, si je ne gagne pas avec l’équipe de France, j’aurai l’impression que je n’ai pas réussi ma carrière. Parce que l’équipe de France m’a beaucoup donné quand j’étais jeune. Elle m’a fait voyager, m’a donné la chance de pouvoir exprimer mon talent ».

Cette médaille, il ira la chercher. Après dix ans de galère. De rendez-vous manqués. « 2005-2007, on touche le fonds mais j’ai pas lâché l’affaire ». Puis la délivrance. 2011, la plus belle équipe de France, médaille d’argent européenne et ticket pour les JO de Londres. Enfin, 2013 : médaille d’or aux championnats d’Europe après un incroyable renversement de situation en demi, face à l’ennemi juré espagnol. « A la mi-temps, j’avais envie de tuer mes coéquipiers. On peut perdre, mais pas comme ça, pas en se faisant marcher dessus. Et puis, on fait la deuxième meilleure mi-temps de l’histoire du basket français et on gagne en prolongations ». Dernière médaille en 2015, à la maison. Tony devient meilleur marqueur et meilleur passeur de l’histoire des championnats d’Europe. « C’était beaucoup d’émotions. Mon dernier Euro, ma dernière fois avec l’équipe de France en France... »

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